Pour Ignace Pederewski

Maître, quand j'entendis, de par tes doigts magiques, Vibrer ce grand Nocturne, à des bruits d'or pareil; Quand j'entendis, en un sonore et pur éveil, Monter sa voix, parfum des astrales musiques; Je crus que, revivant ses rythmes séraphiques Sous l'éclat merveilleux de quelque bleu soleil, En toi, ressuscité du funèbre sommeil, Passait le grand vol blanc du Cygne des phtisiques. Car tu sus ranimer son puissant piano, Et ton âme à la sienne en un mystique anneau S'enchaîne étrangement par des causes secrètes. Sois fier, Paderewski, du prestige divin Que le ciel te donna, pour que chez les poètes Tu fisses frissonner l'âme du grand Chopin! [Extrait de Récitals étranges]